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Une française au pays des sables
Une française au pays des sables
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3 janvier 2006

Arlit forever...

Décidemment, Arlit n’est vraiment pas une ville pour moi… Je ne sais si c’est à cause de la radioactivité ambiante, mais, passés trois jours, je tombe systématiquement malade. Cette fois ci n’a pas fait défaut.

Pourtant, le séjour se déroulait pour le mieux. Nous faisions le tour de la famille et des connaissances d’Aghali, lui permettant d’oublier ses soucis iférouanais. N’ayant pas de véhicule à disposition, nous grattions du matin au soir dans la poussière. A notre arrivée, Zico nous avait déposé chez un iférouanais cadre à la Somaïr, une des deux sociétés minières qui exploitent les gisements d’uranium. Ils résident dans une cité construite à l’origine pour les cadres européens expatriés. De ce fait, leurs maisons ont un style et un équipement occidental. Aghali pensait que j’y serais plus à l’aise, mais je préférais les habitations locales traditionnelles et j’ai insisté pour qu’on déménage afin de retrouver l’ambiance. En plus, nous avons passé la nuit à être dévorés par les moustiques. Nous avons donc quitté pour aller loger chez un cousin d’Aghali dans un autre quartier, où nous avons passé le reste du séjour.

J’avais pris l’habitude de faire le thé le matin avant le départ pour une première série de courses. Nous revenions pour déjeuner vers 13h, puis repartions après le sieste jusqu’au coucher du Soleil. Notre hôtesse, la femme du cousin d’Aghali, était une jeune femme charmante et très sympathique (en plus d’être belle). Nous fûmes fort bien accueillis et nous sentions à notre aise. Aghali passait son temps à me raconter sa vie à Arlit lorsqu’il était adolescent, ainsi que de nombreuses anecdotes. Parfois, Aghali Tchanka passait nous saluer, ou nous le croisions dans la rue, et nous tenait au courant de ses affaires citadines.

Mais Arlit est une ville trop bizarre à l’atmosphère fantomatique. Un soir, nous étions partis rendre visite aux parents adoptifs d’Aghali et sa mère insista pour nous garder à manger son gourassan (le pain touareg que les femmes préparent dans des fours traditionnels, un vrai délice). Nous sommes donc revenus la nuit tombée, marchant dans une ambiance des plus fantastiques. La poussière s’était levée, balayée par un vent qui ne cessait de souffler depuis le matin, rendant les alentours brumeux et les lumières diffuses. Il faisait froid, les larges rues étaient quasiment désertes. Quelques personnes se regroupaient chez les tabliers, regardant les derniers films haoussa made in Kano au Nigeria, ou écoutant les chansons de cette artiste éthiopienne trop à la mode depuis les derniers mois. Le ciel était obscur et au loin brillait l’usine de la Somaïr comme un navire échoué à l’horizon. Ce soir là, j’ai ressenti une ville triste. Arlit tichak. Arlit, c’est moisi. Les ouvriers dans les bidons villes radioactifs de la périphérie, les cadres dans les cités proprettes du centre ville, et les rues désertes où on déambule à la recherche de distraction.

Au bout de trois jours, le blues de la brousse s’est fait ressentir. A partir de là, chaque journée avait son lot de malchance, et plus ça allait, plus nous étions désireux de revoir notre village. Dur l’exode rural ! Aghali s’inquiétait pour sa famille tandis que moi, je voyais ma santé se dégrader. Mal de tête, de ventre, bref, le coup classique. Et pas la peine de faire comme si de rien n’était, ça ne voudra jamais passer sans laisser quelques souvenirs désagréables… Aghali a donc pour la énième fois tenu le rôle de garde malade. Un soir que j’allais un peu mieux, nous sommes tout de même partis aux portes de la ville observer le coucher du Soleil sur Arlit tandis que la Lune se levait sur le Désert environnant. Loin derrière les montagnes, nous savions que se tenait Iférouane et nous pensions à ceux qui nous y attendaient. Des voitures partaient en brousse, soulevant des nuages de poussière, des caravanes d’ânes apparaissaient soudainement, sorties du néant, lourdement chargées de paille récoltée dans les environs pour être vendue en ville. En cette période de sécheresse, il s’agit d’une denrée très recherchée pour les animaux.

Puis le dix roues de Zico est venu et nous nous préparâmes dans la hâte et l’impatience pour enfin repartir. Je redoutais toutefois le voyage retour, ma forme n’étant pas au beau fixe. Mais si maladie il y avait, ça n’allait sûrement pas être à Arlit que j’allais guérir ! Le camion était vraiment surchargé cette fois ci, et je dois avouer que j’ai bien été malade, mais je suis arrivée sans encombre à destination. Et puis, avec Aghali à mes côtés, je savais qu’il ne pouvais rien m’arriver.

Malgré les déboires, je garde un bon souvenir de ce voyage sur Arlit. Nous avons réussi à faire toutes nos courses, et nous nous sommes changé les idées, en plus de vivre des moments inoubliables. Cependant, ça m’a confirmé que la ville n’est vraiment pas un endroit où il fait bon vivre, et rien ne vaut l’ambiance de la brousse !

L’arrivée du dix roues fut saluée par les cris et les applaudissements des enfants qui attendaient devant la station essence. Ibro, le cousin tailleur, était là, ainsi que des neveux d’Aghali qui nous aidèrent à porter les bagages. A peine la tranquilité de la maison retrouvée, assise sous le hangar avec Tinna, Toumat et Effes, arriva également Toufé accompagné d’Annaïck, une amie française, et de Toula et ses filles, une cousine ayant récemment été hospitalisée à Agadez. La maison s’est alors quasi instantanément emplie, l’information des arrivées circulant de bon train dans le quartier forgeron. Tous venaient saluer les nouveaux venus.

Etant sur les rotules, je n’ai pas tardé et suis vite allée me coucher, retrouvant la chambre de Tinna après un long séjour loin de la maison. Ibro et Hamo ont bien essayé de me maintenir éveillée pour causer, mais le marchand de sable les a convaincu qu’il valait mieux laisser la discussion à demain…

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